Chapitre IV: Nef & Bas coté Nord.
L’intérieur de l’église : Nef & Bas-coté
Les étapes de sa construction
Après avoir franchi le Narthex, nous pénétrons dans la nef de l’église parla porte Ouest dépourvue de moulure et de toute autre ornementation. Le linteau est en anse de panier surbaissé, comme toutes les portes de l’édifice (sauf la porte de la nouvelle sacristie qui a pris la place de la chapelle seigneuriale après la restauration des années 1950 -›196O ?)
Nous sommes dans la nef, ce qui nous amène à parler tout de suite des étapes de la construction : si nous n’avons pas de certitude quant à la date du début de la construction de l’église, nous en avons une en ce qui concerne la fin de l’édification de la chapelle seigneuriale par une date 1545 figurant sur une verrière qui la ornait. Cette tranche de travaux était pour nous la 5ème. Là, nous allons quelque peu contredire la Picardie Historique et Monumentale (P.H.M) qui donne pour 1er campagne de travaux l’ensemble nef- bas-côté Nord – clocher. Pour nous, ces trois parties de l’édifice ont été exécutées, non par ensemble, mais en trois étapes bien distinctes. Des preuves qui n’ont pas pu être décelées par les auteurs de la P.H.M nous ont été révélées au cours de fouilles qu’il a fallu faire pour chercher le sol solide afin de rétablir les bases des piliers effondrés en mai 1940.
Première tranche des travaux
Des photos prises à cette époque par l’entreprise « CHARPENTIER P.M ›› sous les ordres de M. SALLEZ, alors architecte en chef des Monuments Historiques, montrent bien que la nef était bel et bien seule construite en premier lieu. Nous allons expliquer cette thèse :
Le mur Nord de cette nef unique (au chevet plat) a bien été construit en pierres meulières, moellons de craie et damier de silex alternés et cela dans toute sa longueur. Les photos noir et blanc de l’époque montrent également les fondations des contreforts Nord destinés à épauler
les doubleaux des voûtes futures.
De plus, un contrefort dans l’angle Nord-Ouest, visible encore à l’extérieur entre le pignon Ouest du bas-côté et la tour de l’escalier, est en diagonale comme celui de l’angle Sud-Ouest, chose illogique si la tourelle et le clocher étaient construits en même temps.
Nous ferons la même constatation dans l’angle Nord-Est du transept Nord. (voir annexe)
Diaporama des photos en noir et blanc de l’entreprise Charpentier en 1946.
Nous irons même plus loin dans les suppositions (qui n’engagent que nous !) : il se pourrait bien que cette étape de la construction réalisée a été dotée d’un clocheton ou un pignon clocher campenard où était installée une petite cloche que l’on tirait de l’intérieur de cette grande chapelle. Des traces de frottements de cordes apparaissent sur l’arc formeret et sur l’arc de la porte du mur Ouest (ce n’est là bien sûr qu’une supposition)
Deuxième tranche des travaux
La deuxième tranche de travaux serait alors le clocher (avant 1500). On constate, vu l’importance de la tour, l’ambition des maîtres d’œuvre de bâtir quelque chose de grand.
Troisième tranche des travaux
Nous sommes à la fin du XIème siècle et d’après les archives et écrits, en 1497, deux seigneuries se réunissent, deux villages Huppy haut et Huppy bas. On peut supposer alors que la population augmentant, les édiles sont amenés à agrandir l’église. Ils construisent alors le bas-côté Nord. Pour cela, ils établissent des piliers et des arcs à la place du mur Nord dont ils conservent les fondations. Ils dotent le mur Nord de grandes baies et percent le mur Sud de la nef pour y établir également des grandes baies qui vont remplacer les plus petites mises en place à l’origine. Nous épaulerons cette thèse par le fait qu’en observant les deux murs Nord et Sud, on constate :
Sur le mur Nord, l’arc de la baie et le formeret de la future voûte sont en pleine harmonie alors que sur le mur Sud, I’arc des baies est mangé par le formeret, lui-même brisé, comme construit en deux fois (même constatation sera faite dans le Chœur) Cette troisième étape ayant sûrement empiété sur les premières décennies du XVème siècle.
Un projet non réalisé ?
Dans nos suppositions, nous y ajouterons celle-ci. On peut penser que des bâtisseurs avaient l’intention de construire un second bas-côté Sud puisqu’ils ont laissé les voûtes en attente (comme à Fontaine-Sur-Somme) : projet abandonné faute de moyens ou gêné par le cimetière
qui entourait l’église et la « chapelle ›› primitive qui devait bien exister car Huppy le village lui-même existait et un culte y était célébré.
Des pierres de réemploi
Pour appuyer cette supposition, nous reviendrons dans le bas-côté Nord pour y constater que comme dans toute l’église, les culots sont ouvragés et sculptés de feuillage, acanthe, houblon, chardon ou vigne, sauf les deux des angles Nord-Ouest et Sud-Ouest qui sont d’un style plus
roman que gothique, de même que les quatre de la voûte du premier étage de la tour (voir description) Nous ne possédons pas de photo ce de pignon d’avant la guerre qui nous montrerait si l’appareillage des culots et gerbes coïncidaient avec les assises du moellonnage.
Une voûte en bois
Les voûtes de pierre n’ayant pas pu être réalisées, les bâtisseurs ont « greffé ›› dans les charpentes traditionnelles une voûte en bois lambrissée. Cette voûte plus plate, moins haute que celle actuelle bâtie en 1964, laissait apparaître des éléments essentiels de charpente, tels que liens, contrefiches ou jambettes. Certaines pannes ont pu être ouvragées voire sculptées puisqu’un élément récupéré dans les décombres à l’époque est exposé dans le musée du Clocher et comporte une frise sculptée.
La P.H.M
Un point important mentionné dans la P.H et M et qu’il nous paraît bon de signaler en la citant textuellement :
La construction des nefs a précédé celle des croisillons et du chœur. Le grand arc en tiers-point qui sépare la nef du carré du transept, en renforçant le dernier pilier, a noyé en partie les nervures d’attente, l’extrémité des deux ogives qui se voient de chaque côté montrent bien que le plan primitif fut modifié.
Ces vestiges capitaux pour la compréhension n’ont pas été remis en l’état par les restaurateurs après la guerre 39/45, ce qui est bien dommage. L’archivolte de I’arc Doubleau visible sur une photo de la P.H et M n’a pas elle non plus été rétablie. Heureusement qu’il n’en a pas été de
même pour les culots et les départs de voûte de la nef et du bas-côté Nord.
Avant de quitter la nef, regardons le mur Ouest côté du clocher :
Là, les bâtisseurs ont eu la bonne idée de ne pas faire descendre les contreforts jusqu’au sol. Ils les ont arrêtés à la hauteur des culées de voûtes futures en les amortissant en consoles ouvragées de boudins.
Pour la description de la nef citons textuellement la Picardie Historique et Monumentale :
L’église de Huppy est avec celle de Fontaine, le plus beau et le plus complet monument de notre Canton et peut soutenir en comparaison avec sa rivale des bords de la Somme. Si elle n’a pas le joli portail de celle-ci, elle possède un élégant clocher ; si elle ne montre pas dans ses
voûtes les fines sculptures de la chapelle de la Vierge de Fontaine, elle déploie dans ses fenêtres de magnifiques verrières. Les deux églises se complètent l’une l’autre. Elles appartiennent au même style et furent construites sans doute à la même époque. L’église de Huppy, moins vaste que sa voisine n’a qu’un seul collatéral qui flanque le côté septentrional de la nef. Trois grandes arcades relient les deux nefs.
La nef comprend trois travées. Les constructeurs avaient pensé la couvrir d’une voûte de pierre, ainsi que le collatéral et les nervures d’attente, heureusement respectées par les restaurateurs du monument, marquent encore le départ des doubleaux et des ogives. Les trois nervures identiques comme profil, reposent sur de petits culots ornés de feuillage ; sous quelques-uns de ceux-ci, on a découvert récemment des croix de consécration. Trois piliers rectangulaires aux angles abattus recueillent les retombées des grandes arcades en tiers-point, qui se composent
d’un gros boudin s’engageant par une pénétration triangulaire dans le pilier et d’une série de cavets et de bandeaux. Une moulure prismatique forme archivolte. La construction de la nef a précédé celle des croisillons et du Chœur. Le grand arc en tiers-point qu sépare la nef du carré
du transept, en renforçant le dernier pilier, a noyé en partie les nervures d’attente. L’extrémité des deux ogives qui se voient de chaque côté montrent bien que le plan primitif fut modifié. D’autres détails le prouvent encore : les grandes arcades du carré du transept et les consoles
qui reçoivent les nervures sont sensiblement plus basses au transept et au Chœur qu’à la nef. (fin de citation de la P.H.M)
Cette dernière phrase étant inexacte, c’est I’inverse : les culots du transept sont plus hauts (4,45 m pour 4 m au Chœur et 3,75 m dans la nef)
(voir annexe VII )
Un bandeau qui forme également le nez des appuis de fenêtres court sur le mur Sud de la nef, à 2,50 m environ du sol, en formant un décrochement au dessus de la porte Sud et sur le mur Nord du bas-côté Nord. Les murs Ouest en sont dépourvus ne possédant pas de fenêtre. Un petit bénitier en marbre est scellé à l’entrée de la nef.
Charpente
La charpente ouvragée a été refaite en 1964 plus ogivale que l’originale, elle est dotée de bardeau en planchettes de châtaignier et de couvre-joints moulurés. Une sablière à plat répartit les charges sur le mur. De grosses sablières moulurées relient les entraits, eux-mêmes
ouvragés aux abouts et au centre.
Les têtes et les bases des poinçons sont moulurés pour passer de la forme carrée à la forme octogonale sur la longueur.
Les pannes et le sous-faîtage saillants sont pourvus également de moulures.
Six fermes composent cette charpente formant 5 travées et deux plus petites à l’Est et à l’Ouest où les entraits passent devant le bas des contreforts du clocher.
Le pavage
Actuellement, le sol est constitué d’une chape en béton établie à 10 cm sous le niveau définitif. D’après les photos et les fragments retrouvés après la destruction partielle de l’église, l’allée centrale était pavée de carreaux de terre cuite hexagonaux, tandis que sous les bancs de la
nef, le sol était couvert de briques très plates en usage à l”époque. Le reste de l’église était doté de carreaux décorés ou de dalles en marbre noires ou blanches en damiers.
De nombreux fragments sont exposés dans les salles du musée du Clocher, nous en reparlerons.
Dimensions (moyennes)
Nef : longueur: 15,55 m – largeur 1 7,20 m
Bas-côté Nord : longueur: 15,64 m – largeur : 4,66 m
Crois de la consécration (vestiges)
Citées dans la Picardie Historique et Monumentale à la page 140 (Ponthieu-Vimeu) MDCCCV, 1905, qui n’en donne pas le nombre ni leur position exacte. Nous avons recherché ces vestiges, sous quelques-uns de ceux-ci (culots) on a découvert récemment des croix de consécration.
L’église ayant été fortement restaurée après la guerre.39/45, nous n’avons retrouvé qu’une seule trace de ces croix de consécration. Elle est située comme l’indique la P.H et M sous le premier culot de voûte au Sud dans la Nef.
Cercle légèrement gravé dans la pierre
La croix peinte d’un rouge brique (badigeon)
De forme très incertaine
Consécration : rendre sacré – action sacrée par laquelle une personne ou une chose est séparée du monde profane et affectée définitivement au Culte de Dieu.
En dehors de la consécration eucharistique, les choses consacrées peuvent être des églises, des autels, des cloches ou des vases du Culte.
La consécration suppose l`usage d’un Saint-Chrême et doit être effectuée par un Ministre ayant reçu le caractère épiscopal.
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Annexe: hauteurs des culots.
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